Contrairement à ce que les ouvriers attendaient, ce ne furent pas les troupes belondaures qui intervinrent. Au contraire, les troupes de la toute nouvelle MNA prirent position au niveau des principaux carrefours. Les fonctionnaires n'étaient pas tous armés de fusils : la plupart étaient équipés de simples bâtons afin de pouvoir disperser les éventuelles émeutes. Le reste, constitués en petits groupes, disposait de fusils pour intervenir en appui en cas de violences plus graves.
Les troupes de la MNA se contentèrent de se positionner et de surveiller sans intervenir. Les émeutiers se cantonnaient derrière les barricades, scandant leurs slogans, dans l'expectative : qu'allait-il se passer ?
La réponse ne vint pas des représentants de l'ordre : en ville, la rumeur courrait que plusieurs maîtres des ateliers avaient été expulsés manu-militari de leurs usines textiles par les uniformes verts de la nouvelle milice. La plupart l'avait été après avoir fait faillite, le reste pour des motifs inconnus.
L'important restait que des administrateurs du CNACI avaient pris possession des lieux et recrutaient à tour de bras. De longues files de candidats se constituaient dans les faubourgs. Le travail allait reprendre.
De suite, les cortèges de protestataires commencèrent à se dissoudre. Les officiers de la MNA attendirent encore une heure ou deux selon les quartiers avant de disperser les récalcitrants. Ils firent place aux ouvriers municipaux afin de déblayer les ruelles du port.
Marksane regardait tout cela du haut de son bureau situé dans le palais princier. Perché sur la falaise séparant Port-Habsbourg des quartiers centraux de la Capitale, il assistait à la dissolution de la foule avec les membres de son cabinet.
- Faites rouvrir par le gouvernement quelques boulangeries dans le port et relancez la vente de pain subventionné. Il ne faut pas que ce genre de troubles recommence. Les réformes économiques n'en sont qu'à leur début et la dernière chose dont j'ai besoin est d'un prolétariat révolté.